Chez les enfants et les adolescents, une inflammation chronique de bas grade a été impliquée dans la pathogenèse de diverses pathologies de la santé mentale et de comorbidités associées. La qualité de l’alimentation est un mécanisme d’action potentiel qui peut exacerber ou améliorer l’inflammation de bas grade. Cependant, la manière exacte dont l’alimentation peut réguler la réponse immunitaire chez les enfants et les adolescents n’est pas encore entièrement comprise. Nous présentons dans cet article la première revue systématique examinant les relations entre l’apport alimentaire et les marqueurs biologiques de l’inflammation chez les enfants et les adolescents.
L’inflammation est une réponse physiologique aux dommages cellulaires et tissulaires qui nous protège contre les bactéries, les virus et les infections. Elle élimine les agents pathogènes, favorise la réparation cellulaire et restaure les conditions d’équilibre de l’organisme (Calder, 2011). Cependant, une inflammation chronique de bas grade, reflétée par la surproduction de protéines pro-inflammatoires, essentiellement la protéine C-réactive (CRP) et des cytokines comme l’Interleukine 6 (IL6) et le TNFα, peut causer des dommages irréparables et augmente le risque de troubles psychiatriques (dépression, schizophrénie) chez les enfants et les adolescents (Giacobbe, 2020), associés à des pathologies variées (cardiovasculaires, diabète de type 2, obésité) (Al-Hamad, 2017).
Des habitudes alimentaires saines dès l’enfance réduisent l’inflammation systémique
Une inflammation chronique de bas grade peut être favorisée par les traumatismes de l’enfance, le stress psychosocial, ainsi que des éléments du mode de vie comme la sédentarité ou le tabagisme. De plus, la qualité de l’alimentation peut exacerber ou améliorer l’inflammation de bas grade et influencer la santé mentale (Marx, 2021).
Des habitudes alimentaires saines, comme le régime méditerranéen, la consommation régulière de légumes et de fruits, d’aliments riches en acides gras polyinsaturés oméga-3 (AGPI), en vitamines C et E, ont montré qu’elles réduisaient l’inflammation systémique (Grosso, 2014). Modifier les apports alimentaires dès l’enfance et l’adolescence représente une stratégie prometteuse pour maintenir une réponse immunitaire adaptée et réduire les risques de troubles mentaux et de comorbidités ultérieures.
Une consommation élevée de fruits et légumes est associée à des niveaux plus faibles de protéine C-réactive
Les articles inclus évaluent la relation entre certains modèles alimentaires (le régime alimentaire DASH, les régimes à index glycémique bas et élevé, le régime méditerranéen et le régime occidental), indices alimentaires (Healthy Eating Index), groupes d’aliments, ou macronutriments/ micronutriments et les bio marqueurs inflammatoires chez les enfants et les adolescents, de 2 à 19 ans (voir ci-dessous l’encadré « Méthodologie »). Parmi les 53 études identifiées, 15 ont examiné des groupes d’aliments : les légumes et les fruits, les produits laitiers, la viande, les fruits de mer et les œufs, les céréales complètes et raffinées et les sucres ajoutés. 9 études observationnelles ont révélé qu’une consommation élevée de légumes et/ou de fruits était associée à des niveaux plus faibles de protéine C-réactive (CRP) et de marqueurs inflammatoires dans cette population.
Les modèles alimentaires sains sont associés à une diminution des niveaux de bio marqueurs inflammatoires
Concernant les modèles alimentaires, les résultats indiquent que ceux considérés comme sains (régime DASH, régimes à faible indice glycémique, régime méditerranéen) s’associent à une diminution des niveaux de bio marqueurs inflammatoires. Parmi les constituants individuels, la consommation de légumes et de fruits, de céréales complètes et d’acides gras mono et polyinsaturés est associée à une réponse inflammatoire favorable. En revanche, un régime alimentaire occidental (notamment riche en acides gras saturés), provoque une réponse pro-inflammatoire augmentée. Les mécanismes par lesquels ces modèles alimentaires sains modulent le processus inflammatoire sont largement sous-explorés. L’effet protecteur pourrait être lié aux propriétés anti-inflammatoires de leurs constituants. Le régime méditerranéen se caractérise notamment par des apports élevés en légumes, fruits, céréales complètes, légumineuses… Il est riche en antioxydants, folates etflavonoïdes anti-inflammatoires. Sa teneur élevée en fibres favorise la santé intestinale et la croissance d’espèces microbiennes qui régulent l’inhibition ou la production de cytokines pro-inflammatoires.
Thierry Gibault
Endocrinologue-nutritionniste, Paris, France
Source: Bujtor et al. Nutrients.2021; 13(2):356. – Figure adaptée par Aprifel